Giorgos Roupakias, l’assassin présumé du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas, le 7 mai 2015 près d’Athènes. AFP PHOTO/ Louisa Gouliamaki.
(Par Charlotte Stiévenard Publié, correspondante de RFI à Athènes, 04-11-2015)
Le plus gros procès criminel de l’histoire de la Grèce se poursuit depuis un peu plus de dix mois. C’est celui du parti néo-nazi Aube dorée. Soixante-neuf personnes sont accusées de direction ou d’appartenance à une organisation criminelle. Un procès qui se déroule pourtant dans une relative discrétion.
L’affaire a démarré il y a deux ans avec la mort de Pavlos Fyssas. L’assassinat du rappeur antifasciste a conduit à l’arrestation de la direction du parti néo-nazi Aube dorée dans son ensemble. Le procès a commencé un an et demi plus tard, et depuis septembre, ce sont les témoins qui sont auditionnés. Les parents de Pavlos Fyssas, un ami du chanteur présent sur les lieux et un policier. Mercredi 4 novembre, c’est un autre policier qui est entendu, celui qui a passé les menottes à l’assassin présumé, Giorgos Roupakias, juste après les faits. Il l’aurait alors entendu dire qu’il était membre d’Aube dorée.
Un procès loin des caméras
Les activistes antifascistes reprochent à ce procès de se dérouler à l’abri de l’exposition médiatique. Ils remettent notamment en cause le choix du lieu qui abrite les débats : la prison de Korydallos. Elle se trouve à une vingtaine de minutes en voiture du centre-ville d’Athènes. A l’ouverture du procès, les avocats de l’accusation avaient demandé qu’il ait lieu dans une salle plus grande au centre. Jusqu’ici, le ministère de la Justice dit n’avoir reçu aucune demande officielle de la part de la présidente du tribunal.
Au sein du journal Efimerida ton Syndakton, qui dénonce depuis plusieurs années les actes de l’organisation néo-nazie, on déplore l’absence d’écho médiatique. Le « Journal des rédacteurs » pointe le peu d’intérêt que portent les gros médias pour le sujet. La chaîne Mega TV s’est défendue par la voix de l’un de ses rédacteurs en chef, Antonis Fourlis, qui estime que l’affaire est difficile à couvrir par la télévision, arguant qu’il est interdit de filmer dans la salle d’audience.
La présidente du tribunal avait refusé la demande de l’accusation, car ce n’était pas, selon elle, justifié par la nature du procès. La plupart des accusés, eux, ne veulent pas associer leur image à cette affaire. Ils sont donc peu nombreux à être présents sur les bancs du tribunal. Sur les 17 députés d’Aube dorée parmi les accusés, 12 ont été réélus en septembre.
Aube dorée, une organisation criminelle ?
La difficulté des débats, c’est de prouver que les accusés font partie d’une organisation criminelle. Pour cela, il faut faire la démonstration que c’est une organisation hiérarchisée, que les ordres venaient d’en haut. C’est ce que l’accusation tente de faire avec le cas de l’assassinat de Pavlos Fyssas, mais aussi celui des militants du syndicat communiste PAME agressés à Perama, une banlieue d’Athènes, ainsi qu’avec le dossier des pêcheurs égyptiens, attaqués au Pirée.
Pour l’un des avocats de l’accusation, Thanasis Kampagiannis, le procès se déroule trop lentement, ralenti par une défense qui joue la montre en multipliant les procédures. Vaso Pandazi, l’avocate d’Eustathios Boukouras, un ancien député d’Aube dorée qui a quitté le parti depuis, n’est pas d’accord. Selon elle, les accusés ont eux aussi tout intérêt à ce que cela aille vite. Et elle estime que l’accusation veut transformer un procès criminel en procès politique.